Été 69

Tof Théâtre

marionnettes / adultes

Création 2023 Théâtre les Tanneurs, Bruxelles dans le cadre des Zakouskis Erotiks

Champ serré

Panier d’osier et nappe à carreaux
Prairies et buissons… ardents !
La vache voit arriver la deux-chevaux
Sous le soleil exactement

À la recherche d’un coin d’ombre,
D’un coin de sombre
Loin des regards

Pique-nique torride
La vache à tâches les cache…

Champ large

Jean joue avec ses souvenirs
Ils lui sortent de la tête et des mains
Ils entrent dans nos yeux, nos oreilles…
Alors s’allument nos petits soleils

Comédiens/marionnettistes Alain Moreau et Jean Dekoninck
Accompagnement artistique et customisation des images projetés Thomas Boucart
Coups d’œil complices Nicolas Laine, Dorothée Schoonooghe et My-Linh Bui
Aide à la réalisation Andrzej Zeydler-Zborowski, Céline Robaszynski et Matthieu Chemin

 

Durée : 25 min

Le spectacle peut se jouer 2 fois par jour

Jauge : maximum 100 pers (dépendamment du gradin)

Espace scénique

  • Dimensions minimum : Ouverture :6m, Profondeur : 3m, Hauteur : 4m
  • Obscurité
  • Installation du public : gradinage indispensable (gradins ou coussins au sol, bancs à mi-hauteur, chaises, tables et possibilité d’être debout derrière les tables)

Montage

  • Montage : 4h
  • Démontage : 1,5 h
  • 1 personne en aide au déchargement et au rechargement

Electricité

  • 1x16A Mono

Son

  • à déterminer

Lumière

  • Le spectacle est autonome, il manque juste votre éclairage public (contrôlé par votre régisseur d’accueil).
  • La Répubblica (Site web) OCT 2023 :
    « Combien de choses peuvent être exprimées avec les mains, la tête, les épaules… Combien de mots inutiles et encombrants disparaissent alors ! Quelle économie ! » Ces mots de Robert Bresson nous guident pour voyager un jour d’été 69 (chiffre lui-même évocateur de géométries séduisantes), en s’enfonçant dans le diorama de la mémoire de Jean, marionnette à taille humaine dotée d’une âme sans mesure, ciselée par l’habileté d’Alain Moreau du Tof Théâtre, artisan d’illusions plus vraies que nature, qui revient avec bonheur à Parme après sa rencontre avec la ville à l’occasion du projet S-chiusi.
    Adepte du « réalisme réduit », également dans Ete 69, la nouvelle courte forme de l’artiste belge en première nationale, par la manipulation à vue, offre le marionnettiste au regard du spectateur comme une sorte de double, de supplément d’âme et non seulement d’animateur de Jean, de sa poésie tendre et décomplexée, de son visage impassible et pourtant merveilleusement expressif, suspendu entre étonnement et mélancolie, entre désir et timidité, humour et enchantement.
    Sur la scène, un projecteur de diapositives, une petite maquette pour revivre une journée parfaite (« A perfect day », chante Lou Reed en fond sonore), se retrouver à bord d’une mythique 2CV bleue sur les routes des collines, sur les traces des désirs, des tremblements et des souvenirs de la jeunesse.
    La scène du souvenir peut se passer de mots (comme les spectateurs s’en passent, sans même en ressentir le manque) car l’intensité d’un jour passé affleure dans une chanson ou une expression, revient dans un geste ou un objet : Pour enflammer le souvenir, avec sa charge de nostalgie et d’enchantement, il suffit par exemple d’un plaid sur les épaules courbées de Jean, ce petit morceau de tissu qui dénoue la chaîne du temps, détourne, au moins pour un temps, sa course rapace, ramène Jean dans le passé, allongé sur cette même couverture à carreaux à côté d’une jeune fille blonde dont la robe est soulevée par le vent…
    Le passé n’est plus définitivement passé, si l’on tient encore un bout du fil de la mémoire et qu’on le suit, ce fil, en se perdant dans le prodige d’une rêverie doucement enflammée jusqu’à ce que revienne l’instant que l’on croyait perdu : kairos, comme les Grecs appelaient le moment opportun, la bonne occasion, mais aussi la chaîne d’une trame et l’étamine, l’âme la plus tenace et la plus fine d’un fil de laine…
    Et si, dans le mythe platonicien, Eros est le fils de l’Abondance et de la Pauvreté, Micro Macro (nomen omen, au nom d’un destin) l’a fait entrer sur scène comme un invité très attendu, faisant briller un art qui transforme la pauvreté en richesse, enflamme les grands rêves avec le fil impalpable des signes, des objets et des gestes minimes, donnant de la visibilité et illuminant avec le feu de la beauté, avec le miracle séculaire du théâtre, les espaces d’un quartier trop souvent décrit comme une cour des miracles marginale habitée par des invisibles. Et un acte d’amour fut le rituel du théâtre.
    Au contraire, dans ce cas, il s’agissait de trois actes d’amour puissants, poétiques et subtils, si inhabituels qu’ils ont effiloché le tissu de l’habitude, dépouillant le spectateur des clichés du regard.
    Comme une étreinte, les applaudissements longs, convaincus et chaleureux avec lesquels le public a remercié les artistes qui ont donné corps à ces trois actes d’amour, offerts à la ville dans le rite antique du théâtre qui, dans son accomplissement, réalise chaque fois la rencontre poétique, politique et érotique d’une communauté qui se reflète dans une histoire, dans une intrigue, dans un rêve, en essayant de se reconnaître, de rêver, de s’inventer, en tissant une nouvelle histoire.
    Lucia De Ioanna